"Usages et formes du paratexte dans l’art moderne et contemporain". Avec David Creus Exposito (séminaire Écriture de la pensée, Paris, en ligne)

21 mai 2021

15:00 - 17:00

 

Séminaire avec David Creus Exposito

"Usages et formes du paratexte dans l’art moderne et contemporain"

pour rejoindre le séminaire en ligne : https://nyu.zoom.us/j/99553218690

 

PRÉSENTATION

Ceci est un paratexte. Il vient s’ajouter à l’immense « ensemble hétéroclite de pratiques et discours », comme écrivait Genette dans Seuils, qui rendent présent une œuvre, l’accompagnent, l’entourent, la glosent, la vendent, la soutiennent, la remplacent… Espaces de « transaction » et de « transition » plus ou moins inaperçus, mots de passage qui ont toujours existé et ne cessent, depuis deux siècles, de proliférer et varier. Incomptables sont déjà les paratextes sans texte, annonciateurs d’œuvres perdues, ratées ou imaginées. À côté des résumés universitaires pompeux et d’autres écrits marchands, il y a sans doute quelques raretés merveilleuses. Il existe, par exemple, une nouvelle où les notes de bas de page envahissent petit à petit le corps du texte - en elles s’y cache le secret du crime. Il existe, par exemple, un bref roman précédé de cinquante-sept prologues et suivi de trois considérations finales. Imaginons un instant que chacun des paratextes de ce roman ait une fonction différente : le premier précise le mode d’emploi de l’œuvre, le deuxième dévoile une clé herméneutique, le troisième fait un détour autobiographique, le quatrième rajoute des informations historiques accessoires (mais qu’il faut quand même savoir), le cinquième postule des thèses si abstraites qu’il pourrait précéder n’importe quelle œuvre, le sixième crée de fausses expectatives et dresse en secret la déception, le septième dément l’interprétation du deuxième, et ainsi jusqu’au soixantième usage. Imaginons ensuite, pour compliquer un peu plus les rapports et voisinages, que ces paratextes transitent vers des œuvres ou conduites esthétiques non verbales (trames plus ou moins complexes d’éléments visuels, plastiques et sonores ; corps en mouvement dans l’espace et le temps). Dans la prochaine séance, nous essayerons d’observer de plus près ces cas, la pluralité des formes et usages du paratexte dans l’art moderne et contemporain, en prêtant attention aux questions qu’ils pratiquent et nous posent sur le langage, l’écriture de la pensée et les limites ou alliances entre le dicible et le visible, le nommable et l’innommable. Certains théoriciens et artistes ont déjà parlé, surtout au sujet des années soixante et ce qui s’en suit, du « tournant linguistique de l’art », au sein duquel les paratextes seraient une vis non négligeable. Mais un vent souffle de loin et, comme le premier Wittgenstein, murmure encore : « il est difficile en art de dire quelque chose d’aussi bon que… ne rien dire ».

David Creus Exposito est chercheur en philosophie, esthétique et littérature. Il prépare une thèse à l’Université Paris 8 sous la direction de François Noudelmann