J.-C. Mathieu, Les Fleurs du mal. Résonance de la vie


 

Ce livre a été écrit au terme d’une longue fréquentation de l’œuvre de Baudelaire, remontant à plus d’un demi-siècle, marquée par la publication d’un premier livre sur Les Fleurs du Mal en 1972.

Ce qui a lancé cette relecture, c’est ce qui m’a semblé manquer dans le livre précédent, l’oreille, l’écoute d’une voix et de sa transcription, la réinvention d’une analyse attentive à «  l’ouï-dire  ».

Qu’est-ce qu’écrire, et penser en poésie, quand la pensée est à l’écoute ? Les impressions de lecture, sédimentées au fil des années, m’avaient donné le sentiment d’une écriture à l’écoute des échos qui résonnent au cœur de poèmes majeurs, «  Correspondances  », «  Les Phares  », «  Chant d’automne  », «  Obsession  ». Le goût même de Baudelaire le portait vers des auteurs qui avaient fait résonner sourdement la langue, Racine, Bossuet ou Chateaubriand. Georges Poulet avait montré la direction  : «  Les plus grands vers baudelairiens sont des vers qui expriment le retentissement  »  ; Yves Bonnefoy invitait à étudier les bruits dans la poésie de Baudelaire, étude qui devait, écrivait-il, mener loin  ; Michel Deguy évoquait, plus largement, le dire poétique comme un «  ouï-dire  ». Il n’est pas excessif d’avancer que, pour Baudelaire, la résonance a révélé la «  profondeur de la vie  », celle de «  cet amalgame indéfinissable que nous nommons notre individualité  » et celle d’une époque moderne dont il a été l’exposant en la haïssant, disait Starobinski.